20110327

Le Vélib à Séoul, c'est parti !

Du neuf sur le service de vélos en libre service de Séoul (pour les premiers "pas", voir "Seoul Velib'", Seoul Village 2008) : ça semble enfin se préciser avec un look franchement plus "Véliboïde", un site dédié (bikeseoul.com), une application mobile, et les 43 premières stations opérationnelles.

Le concept ressemble beaucoup à l'original*, destiné à permettre à un maximum de citoyens de circuler à bicyclette dans la ville, à commencer par ceux qui n'ont pas les moyens d'en avoir une:
- vous payez un abonnement très bon marché pour un jour, une semaine, ou une année (à Paris: respectivement 1, 5, et 29 EUR), mais Séoul propose en outre des packages d'un et six mois (cela donne 1.000, 3.000, 5.000, 15.000, et 30.000 KRW, à diviser environ par 1.600 pour avoir les tarifs en Euros).
- vous ne louez pas spécifiquement un vélo, mais vous avez l'accès illimité à des vélos spéciaux que vous devez prendre et déposer dans des stations spéciales
- vous ne payez rien de plus pour une course de moins de 30 mn, mais au moins 1.000 KRW par heure au-delà
- si vous avez besoin de rouler au-delà de 30 mn mais ne voulez pas payer, il vous suffit de faire une étape à une station ou de changer de monture avant chaque échéance de 30 mn pour remettre le compteur à zéro
- le service fonctionne 24 h sur 24, 7 jours sur 7, tous les jours de l'année, et il est entièrement automatisé grâce à un système de kiosques et de cartes sans contact
- bonus: les vélos sont beaucoup plus légers et bourrés d'électronique qu'à Paris, où les vols et dégradations sont hélas monnaie courante, où l'engin pèse autant qu'un tank Sherman (ça tombe bien, les collines ne manquent pas à Séoul), et où le guidon ne présente aucun écran (le vélib séoulien fera bon usage des services de localisation).

Avec ce concept, la couverture (nombre et densité de stations dans la ville) et la disponibilité (nombre de places par station, répartition harmonieuse entre les stations) sont les facteurs clef de succès. Paris a opté pour un scénario très agressif : dès le lancement du Velib' en juillet 2007, 750 stations et 7500 vélos pour une ville de 105 km2 et 300 stations de métro, et une 1000e station Velib' inaugurée avant la fin de la même année.

Séoul compte bien trois cent stations de métro, mais sur un espace six fois plus vaste que Paris, et même si les voies cyclables se multiplient**, les quartiers sont beaucoup moins bien connectés les uns aux autres : de vraies montagnes jalonnent une ville zébrée par des axes quasi autoroutiers, et le fleuve Han coupe réellement la capitale en deux (largeur moyenne à Séoul: environ 1 km). Je rêve depuis 2007 d'un Vélib séoulien (qui pourrait bien être proposé par le même prestataire***), mais je sais bien qu'il serait illusoire d'espérer le même niveau de service au démarrage.

Pour moi, depuis le départ, la seule solution serait de procéder progressivement en commençant par les hubs "bike friendly" existants, en connectant peu à peu ces sous-réseaux en forme d'étoile, et en réduisant avec le temps les trous dans la raquette.

C'est peut-être le scénario retenu par la ville de Séoul. Avec seulement 43 stations regroupées dans les quartiers de Sangam et Yeouido, ce programme ressemble moins à un vrai lancement qu'à un test grandeur nature sur deux zones assez proches l'une de l'autre, une de chaque côté du Han, et toutes deux connectées au principal réseau cyclable de la ville, le long du fleuve.

Autre indice: la quasi absence de branding et de publicité pour l'opération : je n'imagine pas un instant Seoul Metropolitan Government zapper sur cet élément essentiel du mix, ni conserver le nom / marque blanche actuel, sans logo, "공공 자전거" ("gonggong jajeongeo" ou "Vélo Public" de la Ville de Séoul)...

... Ou pire encore : recycler la mascotte Haechi, déjà à l'oeuvre sur tous les programmes vélo de la ville - voir ci contre, extrait du site
bike.seoul.go.kr (à ne pas confondre avec le précité bikeseoul.com, ni avec seoulbike.com, le site d'une expo vélo annuelle)...

Je suis sûr que nous assisterons à une accélération du projet d'ici la fin de l'année, et peut-être même déjà à l'émergence d'une marque digne de ce nom.

En attendant, il est déjà possible de tester le système, ou d'autres programmes municipaux de vélos en libre-service en Corée comme NUBIJA à Changwon (
nubija.changwon.go.kr), ou FIFTEEN à Goyang (très bien signalisé, y compris sur les grands axes autoroutiers, avec la campagne "Let's FIFTEEN!" et une appli iPhone).

blogules 2011 - voir le post original sur
Seoul Village ("Public bike rental services bloom in Seoul and around")

* Paris Velib', ou plutôt son modèle Velo'V à Lyon.
** ça commencerait presque à ressembler à un réseau :

*** comme JCDecaux (le leader mondial en vélo partagé avec son Cyclocity) opère auprès des deux capitales, je suppose qu'il est également en charge de ce projet.

20110312

Le stade ultime du libéralisme, c'est la négation du marché (le déni d'économie continue)

Vous êtes fâché(e) avec l'économie, vous pensez qu'elle ne vous aime pas, que c'est fini entre vous ou même que ça n'a jamais vraiment commencé ? Le moment est probablement venu pour vous de regarder cette étrange inconnue d'un oeil nouveau et pour ce faire, je suggère un rappel, un constat, et une urgence.

1) Un rappel : l'économie, ça n'est pas sale, et la crise actuelle n'est pas une crise économique mais une crise de l'économie

L'économie, ce ne sont pas que des mathématiques et des colonnes de chiffres. Pour moi, le mot "économie" couvre l'ensemble des sciences et techniques facilitant la compréhension des impacts d'un système ou d'une activité (ex un individu, une société, un organisme vivant...) sur son environnement*.

L'économie peut et doit donc avoir recours aux maths, à la physique, ou à la biologie, mais aussi aux sciences sociales, à l'histoire, à la politique, à la psychologie, à l'ethnologie, à l'écologie... C'est ce qui fait son charme, et c'est ce qui explique que j'ai préféré cette voie à des études plus hémiplégiques (à l'époque, il fallait être soit "scientifique", soit "littéraire")**.

Comme la politique, l'économie est fondamentalement une matière noble et une dimension essentielle de l'humain. C'est notre façon d'assumer cette dimension qui n'est généralement pas à la hauteur. Et la refuser ne présente guère plus d'intérêt : l'"anéconomie" n'a pas plus d'avenir que l'anarchie. Ce n'est pas une forme de courage mais bien au contraire une preuve de paresse intellectuelle, un refus d'assumer son humanité.

Une fois de plus, nous ne surmontrons la dépression actuelle qu'en nous ouvrant à l'économie et non en cherchant à la fuir parce que nous oublions ce ce qu'elle signifie pour l'avenir de cette planète (voir cf "
Du free market au fair market" ou "This is not a financial crisis").

Et qui sait ? Peut-être revenir vers la res economica nous aidera à nous réconcilier avec la res publica.

2) Un constat : depuis 2008, le déni d'économie s'est encore aggravé

Les interventions gouvernementales de 2008-2009 ont certes limité la casse mais en aucun cas résolu le problème à la source.

Le constat de l'époque vaut toujours : il y a presque toujours autant d'argent gourmand à la recherche de retours faciles, mais plus de solutions faciles... à moins de créer artificiellement des objets purement financiers totalement déconnectés des réalités économiques (pour ne pas dire totalement déconnectés des réalités légales). Pire : les habituelles valeurs père de famille et autres formules "garanties" par les institutionnels ne garantissent même plus un retour supérieur à l'inflation. Dans un style différent des années 2007-2008, c'est plus que jamais la panique.

En marge des valeurs refuges habituels désormais sous stéroïdes (immobilier, or...), les microbulles continuent donc à se multiplier, en particulier grâce à des comportements que je qualifierais de "joueurs de casino petit bras", où de gros investisseurs multiplient les petites mises risquées dans l'espoir de toucher le jackpot, de ressentir même furtivement la poussée d'adrénaline du "gros rapport". D'où le retour en grâce des start-up internet, d'où la délocalisation des bulles immobilières, d'où l'apparition de nouvelles loteries plus ou moins exotiques, comme ces investissements dans des centres de formation de joueurs de baseball au fin fond des Caraïbes. Autant parier sur le temps qu'il fera au mariage de Wales et Middleton, ou sur la boîte dont surgira le prochain Sokol, Ebbers, Madoff, Lay...

Au passage : je parlais d'adrénaline mais il existe de fait une forme d'addiction, un phénomène évoqué dans l'excellent documentaire de Charles H. Ferguson "Inside Job". On n'y apprend pas grand chose (à part peut-être pour ceux qui croyaient des Tim Geithner ou autres Larry Summers capables d'aider Obama à réformer le système...) mais c'est efficace, pédagogique et ludique, avec des interviews souvent pertinentes et pleines d'humour.

3) Une urgence : exposer les impostures et restaurer le respect mutuel pour mieux réformer


Quand j'entends les défenseurs de la déréglementation dire qu'il faut laisser le marché s'autoréguler je me marre doucement. Ces experts passent le plus clair de leur temps à fausser le jeu de l'ensembles des acteurs : concurrents, régulateurs, clients, partenaires, analystes... et bien sûr eux-mêmes. Qu'est-ce qu'un dérivatif si ce n'est un moyen de s'affranchir des lois du marché ? On ne manage pas le risque en le masquant derrière des écrans de fumée.

Cela ne s'appelle pas le progrès, mais une fuite en avant. Ce n'est plus du jeu, mais le refus de jouer. De la pure destruction de valeur et de valeurs.

En fait, le stade ultime du libéralisme, c'est la négation du marché.

On était en droit d'espérer un minimum de ressaisissement après les claques de ces derniers temps mais même au fond du trou, ces grands malades continuent à creuser leurs propres tombes avec les ongles. Une fois de plus, ce spectacle effrayant ne durera pas éternellement.

Sans attendre la prochaine claque, l'heure est venue d'établir un minimum de respect. Respect de la loi, respect du métier, respect de la séparation et de l'équilibre des pouvoirs entre les différents acteurs, privé, public, autorités de régulation, médias, analystes, investisseurs... Interdire le cumul des rôles, supprimer les zônes d'ombre et bien sûr les zônes de non-droit, instaurer une totale transparence sur les méthodes, les outils, les nominations, les flux, les financements... en un mot, renforcer le marché en exposant les imposteurs qui prétendent vouloir le libérer.

blogules 2011

* voir "
define: economy" dans les archives

** décidément réfractaire à toute hémiplégie, j'avais à l'examen d'entrée renvoyé dos à dos socialisme et capitalisme comme deux dinosaures du XIXe siècle.

Egalement : "
Mondialisation : du "free market" au "fair market"", "La Faillite nous voilà", "2008, année de crise ou d'espoir ?"...

20110301

La Sarkozie pousse la bulle Hollande

A l'heure où le Sud renvoie dos à dos les idéologues d'ici et d'ailleurs*, ce qu'il reste de notre République Française affiche un bilan pour le moins embarrassant : un président élu pour moderniser le pays mais occupé à démonter les fondements mêmes de la république*, une opposition républicaine incapable de s'inscrire dans la proposition, ou alors en ressortant des utopies d'un autre âge**, et une opposition anti-républicaine (FN, fondamentalistes) du coup totalement remise en selle.

Dans la perspective 2012, les positions sont actuellement les suivantes:
- Marine Le Pen se voit ouvrir un boulevard vers le second tour
- Dominique Strauss-Kahn fait la course en tête dans les sondages en tandem avec Martine Aubry, mais le délicat chantier de l'impossible synthèse entre progressisme light et passeisme démago n'a pas encore été démarré
- l'inéluctable implosion de l'UMP est en marche : les républicains se cherchent un champion (Borloo mieux placé que Villepin pour fédérer au niveau des électeurs comme des élus, même si DDV prouve dans Le Monde qu'il n'a rien perdu de ses talents d'orateur), les Sarkophiles se posent des questions, et Copé prend date pour 2017 en reprenant les mêmes recettes éventées que le tenant du titre.
- les écolos ne parviennent pas à concilier ambitions présidentielles et projet de société, et pourtant Eva Joly présente un potentiel autrement intéressant que Nicolas Hulot

Dans ce contexte, Nicolas Sarkozy semble ne plus pouvoir compter sur lui-même, et désormais miser sur une nouvelle crise planétaire ou une nouvelle cagade du PS. Dans ce contexte, je me suis bien gondolé en lisant le "dossier" du Point sur François Hollande, "l'invité surprise de 2012, l'homme qui fait peur à Sarkozy... et à Strauss-Kahn" : cinq ans après, les armes de désinformation massive de la Sarkozie nous refont le coup de la Ségobulle, avec un candidat baudruche choisi par Le Petit Nicolas pour torpiller ses vrais concurrents.

Gonflé à l'hélium, voilà le sympathique Corrézien reformaté pour récupérer les nostalgiques de son ex comme de l'ex de Sarko, les prolos comme les bobos...

Pour éviter le 21 avril à l'envers, un hamster qui se marre ?

blogules 2011

* voir "
Le rideau de sable et la renaissance musulmane".
** voir "
Traître à la nation" et "Reconstruire d'accord, mais en étant constructif".

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