Sir David, une vie sur terre
Je ne me lasse pas de revoir en boucle les séries de Sir David Frederick Attenborough, et à chaque fois je me dis qu'il serait bien dommage d'attendre son retour à l'humus pour rendre l'hommage qu'il mérite au très exotique et brillantissime naturaliste de la BBC.
Car le David Attenborough est une espèce en voie de disparition ; un dodo aux parures improbables, au chant unique, reconnaissable entre mille par sa façon syncopée d'accompagner un verbe aussi savoureux que désuet. Peut-être bien le chaînon manquant entre Darwin et les Monty Python... d'ailleurs n'est-ce pas John Cleese, l'inoubliable agent du Ministry of Silly Walks, qui lui fait un petit coucou lors de son mythique documentaire à Madagascar ?
Mais Sir David ne ne permettrait pas de comparer le tarsier à un chat passé au micro-ondes ; son humour à lui rime avec l'amour de la vie sous toutes les formes, mise en scène dans des fresques aussi haletantes et volumineuses que les plus grands chefs d'oeuvres du XIXème. Ce naturaliste a probablement produit les sommes les plus ambitieuses à ce jour sur l'éphémère parcours de la vie sur notre éphémère bout de cosmos, et "The Living Planet" résume à la fois parfaitement son oeuvre et celle de la vie sur terre. De fait, "Life" / "Living" et "Planet" apparaissent dans l'ensemble des titres de ses oeuvres ; comme des marques déposées. Non pas par mercantilisme (même si Attenborough doit bien gagner sa vie) mais au sens de marques de respect déposées tous les jours, sur tous les terrains, et par tous les temps.
Petit frère du réalisateur Richard Attenborough (dont on retiendra plus volontiers le très classique "Ghandi" que le très classique rôle du savant dans le Jurassic Park de Spielberg), ce Londonien produit essentiellement pour la Beeb, sous formats audiovisuels et sans lésiner sur les images saisissantes. Pourtant, son point fort demeure à mes yeux l'écriture : tout parait si simple, comme couler de source... mais quel formidable travail en amont pour commencer une phrase en Antarctique et la terminer six mois plus tôt à Kalimantan ! Même sous le charme, on ne peut s'empêcher d'admirer la clarté, la pertinence et l'esprit de synthèse de ce splendide fruit de l'évolution.
Bien sûr, les années passent, les collines se gravissent plus péniblement, les cheveux au vent ont blanchi et la silhouette s'est épaissie, mais à 81 ans, Sir David conserve le regard émerveillé d'un enfant au message écologiste parfois naïf mais toujours sincère.
Immanquablement, un tel monument du vivant aura un jour droit aux honneurs nationaux. Mais par pitié n'enfermons pas ce naturaliste amoureux du grand air dans le formol d'un panthéon poussiéreux, et disséminons plutôt ses cendres et son oeuvre aux quatre vents pour que notre bonne vieille terre retrouve un peu de vigueur. A ceux qui diront "entre ici, Jean Moulin", je répondrai "sors de là, David Frederick Attenborough".
J'ai vu les documentaires "Les défis de la vie" alors que j'étais en terminale, et ça m'a décidé à faire des études en biologie. Je ne sais pas combien de gens Sir David Attenborough a inspiré dans sa vie, mais j'imagine que nous devons être très nombreux.
RépondreSupprimerPour ceux qui sont fascinés par la beauté et la complexité de la nature, je ne saurais que conseiller également la lecture de tous les livres de Stephen Jay Gould, ainsi que le gène égoïste de Richard Dawkins: il y a vraiment de quoi s'émerveiller!
En tout cas bravo pour ce bel hommage, ça me fait bien plaisir de voir que d'autres partagent la même passion, et les mêmes admirations.