"Abus de pouvoir" - François Bayou (gros Plon) - Le Coup d'Etat Permanent V2
Hier, à l'occasion de la sortie d'"Abus de pouvoir", son essai sur la présidence Sarkozy, François Bayrou rendait visite à un David Pujadas visiblement aussi heureux de son scoop que terrorisé à l'idée de commettre un faux pas devant sa hiérarchie.
En fait, la mission du "journaliste" transpirait par tous ses pores : nous on assure juste le minimum syndical pour le temps d'antenne en prime-time histoire de conserver le label "démocratie", et toi tu n'es surtout pas là pour informer sur un non-événement... si polémique il y a, que ce soit sur la personnalité de Bayrou, pas sur les méthodes d'exercice du pouvoir par le Lider Maximo.
Car les dirigeants de France 2 sont prévenus : on ne badine pas impunément avec l'image de Notre Petit Pair des Pipoles. Quand l'Elysée ne traîne pas directement en justice les terroristes commercialisant des poupées vaudou à son effigie (à en croire Sarko, une secte beaucoup plus dangereuse pour la démocratie que les Scientologues), quand elle n'envoie pas une swat team pour intimider un journaliste trop indépendant, elle fait pression sur des tiers pour coller un procès à un media coupable de faire son boulot d'information (les cousins de France 3 ont finalement consenti à porter plainte pour les images "off" révélées par Rue89).
Notre Hyper Hype Président n'a évidemment pas oublié le coup d'éclat de son rival en 2006 face à Claire Chazal* : en guise de lancement de sa campagne présidentielle, Bayrou avait ouvertement dénoncé la mainmise de ses puissants copains sur les media français...
De toute évidence, TF1 n'a pas non plus oublié : "il y a des chaines sur lesquelles je ne suis pas, vous l'aurez observé" a même lâché, goguenard, le Béarnais dans sa seule saillie digne de cet acte majeur de bravitude face à la Grande Muraille de Bling.
Comme l'élève obséquieux les preuves de bonne conduite devant son professeur (de l'autre côté de l'oreillette), David a donc multiplié les attaques directes face à cet improbable Goliath médiatique : son brûlot à charge ne comprendrait que 6-7 pages de propositions par ailleurs très floues, ce ne serait qu'un simple coup "tactique" motivé par la haîne personnelle, de la "politique politicienne" avec en ligne de mire "le second tour des présidentielles 2012"...
Visiblement peu préparé à un tel tir de barrage, Bayrou n'a jamais pu vraiment dérouler son argumentaire :
0) la France va mal, et pas seulement au niveau économique et social. Les Français le sentent clairement, mais ne parviennent pas à formuler précisément leurs inquiétudes... d'où ce bouquin.
1) en fait, la République Française est en danger et son modèle unique est sur le point de perdre ses atouts les plus précieux. L'"égocratie" clanique à la sauce Sarkozy remet même en cause ce principe fondateur : "La France n'accepte pas la loi du plus fort".
2) il devient donc urgentissime de réaffirmer le modèle républicain français et de rétablir les contre-pouvoirs. A fortiori dans de telles circonstances, le droit de vote est un devoir.
3) C'est marrant, y'a des élections dans quelques semaines. Et oh, j'allais oublier : coucou, j'existe. Vous pouvez compter pour moi pour défendre les valeurs de la République. D'ailleurs c'est théoriquement le job du Président...
Enfin je reconstitue le puzzle d'après les rares bribes collectées sous le feu nourri de la mitraillette marionette à talonettes du Sévice Public.
Je n'ai pas lu le bouquin. Mais je me souviens avoir lu il y a une trentaine d'années un exemplaire usé d'un lointain prédécesseur.
En 1964, un autre François avait dénoncé les dérives anti-républicaines d'un autre Président dans un autre pamphlet également paru chez Plon. A l'époque, l'auteur évoquait "Le Coup d'Etat Permanent" au lieu d'un "Abus de pouvoir".
Mais Sarkozy n'est pas de Gaulle.
Et Bayrou n'est pas Mitterrand.
Du moins je l'espère pour lui et pour nous : je n'ai vraiment compris François Mitterrand qu'à la lecture de ces pages où, en totale contradiction avec ses nobles déclarations pro-républicaines, il exsudait une jalousie vénéneuse et un égotisme autocratique proprement terrifiant.
Ambitieux, Bayrou ? Oui, sinon il resterait le cul sur son tracteur au lieu de faire ce métier. Aigri ? Peut-être un peu (on le serait à moins après ce qu'il a subi !)... mais pas au point de perdre le sens des valeurs. Comme l'a confirmé l'épisode d'hier, cet homme joue mieux le rôle de la proie que celui du prédateur.
* voir "Blogule blanc a Francois Bayrou en access prime time" (20060902)
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Stephane