20100910

La chienlit n'est pas une fatalité

Un été animé par les scandales (bérézina sudafricaine, gloubi-boulga Woerth-Bettencourt...), une rentrée marquée par les grèves (savamment préparées par les attaques ciblées sur l'acteur clef de la réforme), une image internationale ternie par les expulsions de Roms (cette surprenante forme d'"émigration choisie" vient d'être condamnée par l'Europe)... la France a tendance à se disperser façon puzzle au moment où elle devrait concentrer toute son énergie sur le coeur de son réacteur républicain, dont l'existence est tout simplement menacée.

C'est d'ailleurs probablement le but de la manoeuvre. Au lieu de "correctionner", la Sarkozie "éparpille, disperse, ventile". C'est joli, les media adorent, et le public en redemande. Mais si l'on enlève tout ce "bruit", que nous reste-t-il au fond ? Des priorités essentielles, mais pas franchement partagées au plus haut niveau :
- économie : rétablir la dynamique du système en le faisant évoluer
- société : rétablir le respect mutuel au coeur du pacte républicain
- politique : rétablir les principes de séparation des pouvoirs au sein d'une république laïque

Economie ? Le "modèle français" ne peut tout simplement pas survivre en l'état (c'est le cas de le dire !), et fonce tout droit dans le mur. On ne peut pas demander plus - ni même autant qu'avant - à l'Etat sans lui redonner auparavant les moyens de ses ambitions. Cela passe par des réformes adaptées à ce siècle et aux tendances démographiques : on ne peut couper à une réforme des retraites, de la santé, de l'éducation, des services publics... Evidemment, en évitant le "modèle" Thatchero-Reaganien, et sans stigmatiser des éléments essentiels de la communauté : sa compétitivité de demain, la France doit également la forger par l'éducation, la santé, les services publics... Or si les réformes étaient plutôt parties d'un bon pied en 2007, l'approche a sensiblement changé, et le conflit n'est pas entretenu que par les "usual suspects", des syndicats arc-boutés sur leurs propres privilèges. On compte désormais des jeteurs d'huile sur le feu dans chaque camp : l'opposition joue la carte populiste pour 2012 quitte à pénaliser le pays tout entier, et au sein de la majorité, des petits malins s'amusent à ressusciter des antagonismes dépassés pour radicaliser le paysage politique national.

Société ? S'il y a un mot que M. Sarkozy n'a pas dans son dictionnaire, c'est bien "respect". Ou alors de façon dévoyée, comme le faisait George W. Bush en le grimant délibérément sous les couleurs de la crainte : un brillant marketing de la peur, de la haîne, de l'incompréhension mutuelle, de l'imposture du clash des civilisations, avec pour objectif l'implosion de la république au profit de ses pires ennemis, ceux de l'intérieur (voir
déclaration universelle). Rétablir le respect mutuel, c'est aller plus loin qu'avant, là où la république avait failli, en particulier vis à vis de ses fils et de ses filles issus de l'immigration. "Déporter" le débat en ostracisant la population "rom" relève du B.A.BA pseudo-nationaliste le plus abject. L'identité de la France se perd dans le repli identitaire. La priorité n'est pas d'expulser telle ou telle ethnie mais de redonner vie au pacte républicain, que tous les citoyens retrouvent l'envie d'y adhérer plutôt qu'à des discours radicaux d'ici ou d'ailleurs. Si l'on cesse d'atteindre aux libertés et si l'on rétablit l'égalité des chances, on donne sa chance à la fraternité.

Politique ? Je ne reviendrai pas sur l'imposture du "
traitre à la nation" : la trajectoire de Nicolas Sarkozy depuis son pacte de 2003-2004 ne laisse aucun doute sur sa volonté d'anéantir la république laïque, même s'il décide de réduire sa "surface radar" d'ici les élections. Il existe pourtant dans ce pays (et même ce gouvernement) des hommes et des femmes de bonne volonté, soucieux de réaffirmer les principes vitaux de la république et exposer les imposture, mais c'est dans les six mois à un an qu'ils doivent former leur plateforme dans la perspective de 2012.

Les Etats-Unis sont certes capables de redonner en Novembre prochain la majorité à ceux qui ont plongé leur pays et le monde au bord du précipice, mais ils ont été aussi capables, grâce à un sursaut unanime de la majorité modérée, d'empêcher le pasteur Jones, un authentique ennemi de la nation, d'autodafer des Corans ce 11 Septembre.

La destruction de la république française n'est pas une fatalité.

blogules 2010

1 commentaire:

  1. Merci pour ce coup de gueule partagé. Il faudrait très vite que les hommes et femmes politiques de bonne volonté aillent à la rencontre des citoyens/nes de bonne volonté en leur faisant de grands signes, nous répondrons présents. Beaucoup de colère pour moi quant à ce qui se passe dans notre pays. Le venin de la "préférence nationale" et de l'étranger chargé de tous nos maux est distillé avec de + en + de virulence, au grand jour. Ce qui choquait il y a quelques années une majorité de citoyens est devenu "un discours du bon sens". C'est tout simplement irresponsable et dangereux. Celui qui nous avait promis de n'avoir aucun tabou nous prouve, pour ceux qui en auraient douté, que les tabous servent avant tout à protéger une société de la régression.

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Stephane

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